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Laisse brûler – Antoine Dole

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Il est là, avec sa belle couverture rouge (signée Alice Nussbaum), et je peux vous dire que je l’attendais, depuis longtemps :) Pas pour les raisons qui ont fait couler tant d’encre lors du précédent roman d’Antoine, mais parce qu’il s’agit là d’un grand roman, d’une grande écriture. Ils ne sont pas nombreux les auteurs à voir à quel point notre société est malade, et de réussir aussi bien à nous le faire ressentir.

Je m’en voudrais vraiment de vous le résumer « bêtement », mais sachez que Laisse brûler tient là toutes ses promesses. On y suit le parcours d’un triangle amoureux, découpé en 4 actes, autour de Noah, Julien & Maxime. Trois personnalités bien différentes, et autant de point de vue sur une intrigue qui évolue au goutte à goutte. La force d’Antoine, c’est aussi son humanité. Et je défie quiconque me dira que cet auteur en est démuni. Parce qu’il en faut des trésors de courage pour nous sortir ses tripes comme ça. Le monde n’est pas toujours aussi rose que ce que la société de consommation dans laquelle on vit veut bien nous vendre nous montrer. Antoine l’a bien comprit et il nous dépeint un quotidien où ses héros sont brisés, anéantis, consumés…

Une société disséquée au scalpel, et servie sur un plateau après une cuisson un peu trop longue. Alors ça sent le cramé, c’est visuellement pas très appétissant, et ça a parfois beaucoup de mal à se glisser à travers l’œsophage. Mais quand c’est passé, on est comme soulagé, et heureux d’être vivant. Parce qu’on a la chance de ne pas avoir vécu ce qu’ils ont vécus, parce qu’on se doit de vivre, pleinement, quand on a la « chance » de ne pas à avoir à survivre…

La télévision tourne dans le vide. Il zappe d’une chaine à une autre .
Gestes bizarrement saccadés, tout obéit à un rituel précis, plage après plage, dix secondes jamais plus (…)
Et la thune que ça coût s’en foutre, les Assédics vidées pas y penser. Les yeux sont cernés, et le visage gonflé, la seule partie de son corps qui semble être alimentée en sang c’est cette foutue main, vissée à cette foutue télécommande. Et ça ne s’arrête pas. Le nombre de canaux  est inimaginable, et le nombre de proies potentielles n’arrête pas d’augmenter.

Il y a aussi ce passage que j’aime beaucoup, page 113, qui se déroule 6 ans avant le « début » du récit :

Autour de moi, des gens pressés se bousculent sans bruit, le pas réglé parles vagues successives affluant sur les rails. Je sors du couloir encadré de lumière, cocon solide et dur tout enlisé d’asphalte. Derrière moi, ces longues minutes en apnée sous la surface de la ville.
Dehors je me sens déjà mieux. Il fait beau, l’air froid me mange le visage. Le boyau de béton me crache sur la place de l’Étoile. Bel endroit pour un naufrage.
20 ans à peine, et je lis dans le regard des autres mon apparence pas terminée, traits de pâte à modeler, m’en tape, je me sens bien. Avec ce geste que j’ai mis des heures à parfaire, je lisse les longues mèches qui m’encadrent le front. Ma fin d’adolescence, je la soigne.

Pour vous faire une autre idée sur ce fabuleux roman, et je le répète, incroyablement bien écrit (je ne compte pas les figures de style, pourtant posées là sans arrogance ni fierté) la prose et le verbe acéré, prêts à en découdre avec une société qui ne veut pas voir les dommages qu’elle cause, vous pouvez voir une belle bande-annonce, réalisée par F. Manga pour le studio 2-35, avec Gil Alma, Antoine Dole, Nicolas Robin, Alberto Bimbocci.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Merci Antoine…

Laisse brûler – Antoine Dole
Sarbacane – Exprim’ – 15 Euros
Et si la lecture vous a transporté comme moi, n’hésitez pas à en parler sur le forum de la collection, il est fait pour ça ; ça serait dommage de s’en priver ;)


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